dimanche 1 juin 2008

Le rosier espionnage

Ce qu'on voit à travers un appareil, une fenêtre, un balcon et un rosier
(quand on n'est pas vu)
et, ce qu'on sauve d'un après-midi, quand on doit le faire

English follows below.

C’est dur. C’est très, très dur.

Et je sais que cela ne concerne personne d’autre alors il faut traiter le sujet avec plus que la plus grande délicatesse.

Les familles recomposées ne sont jamais, ou rarement, faciles. On est toujours ramené au passé, à chaque instant. Des cœurs ont été brisés. Un cœur ne se répare sans effort, et quand on s'en veut à quelqu’un, il est difficile même de vouloir. La colère offre son affreux soulagement dans la place du pardon. L’on peut le dire pour les enfants tout autant que pour les adultes.

Tout prend des proportions plus importantes. Un enfant qui hurlent des injures à son père dans le jardin, où tout le monde dans le quartier peut entendre sans le moindre difficulté ses cries,
« Tu me fais mal ! Tu me fais mal ! Arrête ! Arrête! Ne me touche pas ! », suivit des hurlements à éveiller les morts, n’a rien à voir avec les mêmes injures dirigés à un père divorcé de la part de son enfant.

Il est déjà touché dans son âme. Il a échoué quelque part en faisant une famille qui n’a pas pu rester ensemble. Il se sent coupable. Quelque part il est heureux, ou soulagé que son couple est fini pour des raisons les plus intimes possibles. Nous n’en parlons pas ici. Pas comme ça. Il suffit d’accepter le fait. Ce soulagement de continuer sa vie, mieux, ailleurs, sans avoir tort s’oppose à la volonté de ses enfants, qui veulent, eux, que tout soit resté tel qu’avant.

Mais ce n’est pas les enfants qui décident l’avenir d’une famille, du couple à son centre.

Même, par fois, l’un des parents qui décida ne vie pas aisément son choix, perturbe ses enfants.

Perturbe l’autre qu’elle peut encore perturber, celle qu’elle estime avoir pris sa place.

....

C’est là où il faut…

Il faut.

....

On dit que c’est aux adultes de comprendre. Souvent, je suis convaincue que les enfants savent aussi bien que les adultes. Ils font comme nous. Ils le savent.

Ce qu’ils ne savent pas ce sont les conséquences de leurs actes, de leurs paroles, de leur comportement. Ce qu’on sait est qu’on doit réagir pour leur apprendre. On ne sait pas tous faire. Le papa pense qu’en aiment, en restant stable, en exigeant que son enfant se calme, qu’il obéisse, il fera ses preuves d’amour, qui doivent, couplé de son autorité, suffire pour que tout ait bien.

Mais je n’avais jamais été convaincue.

....

On doit leur apprendre à gérer et à interpréter, à être honnête avec soi, à vivre leurs vies sans les sacrifier dans le malheur des parents, du passé, du « no man’s land » entre les parents qui fut autre fois leur relation, pour ne pas dire leur amour, car ce n’est pas toujours une question d’un amour fini.

On doit savoir les calmer véritablement, c'est-à-dire leur amener au calme à ce qu’ils le sentent au sein d’eux-mêmes.

On doit savoir trouver la vraie volonté – souvent presque impossible de vouloir trouver – de faire du bien au lieu de faire du mal. De faire épreuve de la gentillesse, pour ne pas dire d’un amour qu’on ne se sent pas comme cela, ou pas tout a fait. De rester fidèle à soi et faire ce qu’on estime nécessaire, même si cela ne soit pas forcément apprécié par l’autre.

Car assez de souffrance. Assez de colère. Comment vivre avec l’esprit trouble par ces forces malfaisantes ?

....

Pendant le pire de la crise dans l’après-midi, Baccarat courit en cercles, quasiment hystérique d’angoisse, sans compréhension des cries qu’elle entendait.

Elle n’est qu’une chienne. Un enfant hurle et se bat contre l’homme, qui ne cherche pas à lui faire du mal, mais elle hurle. Elle essaye de répondre, mais elle ne sait pas comment.

« Si te plait, Baccarat s’inquiète pour toi. Arrête, s’il te plait, au moins pour elle. Elle ne sait pas quoi faire. »

Elle est une chienne, et l’un de ses humains hurle.

....

C’est moi. Je dis à son père de ne pas la laisser rentrer chez sa mère. Cela serait le pire. Cet éternel basculement entre les parents dans la colère, la hystérie.

« Ne le fais pas. »

« Je vais le faire. »

....

Je m’adressai à elle. Je lui dis, « Ne rentre pas sans te calmer pour réfléchir. » Je lui dis tout ce que je pense depuis des semaines. Je n’eus plus le choix.

Elle posa un sac. Puis l’autre. Elle s’assit.

« Si tu rentres, tu te souviendras toute ta vie de ce moment, et tous les autres moments précédents qui se passèrent de pareille façon, et cela te fera toujours du mal, même quand tu seras grande un jour. Cela ne va pas de rentrer furieuse, et puis de revenir quelques jours après sucrée comme la saccharine, mignonne, sans ne rien dire. Ce n’est pas cela qui nous fait pardonnés. Tu te souviens. Nous nous souvenons. Ce n’est pas franc. Ce n’est pas l’amour. L’amour demande du courage. C’est toi qui décideras, mais dans le calme. »

Je lui mis la palme sur sa tête. Je lui demandai pardonne pour le mal que je lui fais dans la silence de ma colère, de ma douleur.

Elle resta.

....

Son père lui demand de s’asseoir près de lui. Elle ne bouge pas. Elle ne répond pas. Je vois. Elle est en train de gérer. Il faut la laisser faire. Je lui fis signe de se taire.

« Et si on faisait comme avec les chiennes ? On demande une fois, seulement une fois. Si tu veux aller à côté de ton père, fais-le simplement, directement. Si tu ne veux pas, ne le fais pas. Si tu changes d’avis, dis-le lui. Mais, dis toujours la vérité. Ne fais jamais mendier les gens de ton amour. »

....

Baccarat est là dans la photo, prise après l'ourage fut passé, même si on ne la voit pas bien, à côté d’elle, allongée sur le gazon. Elle veille. Elle fait preuve de fidélité à l’un de ses humaines.

Le père a pu finir un après-midi avec les enfants issues de cette famille rompue.

....

Maintenant, elle roupille derrière moi.

....

La fille est partie. Elle dit au revoir en partant. Le plus souvent, nous ne nous disons rien à son départ. Depuis un certain temps.

« A jeudi. »

« A jeudi. Merci d’avoir réfléchi et d’être restée. »

....

Son père revient.

« Merci pour elle, » dit-il. Bien sur, il a dit son prénom. Je ne le dis pas.

Je ne dis pas non plus, « De rien. » Ce n'est pas la peine, et il n'attend pas pour l'entendre avant de passer dans le jardin.

....

Ce n’est pas fini. Je serai obligée de continuer quand j’aurai peut-être plutôt envie d’être froide et reprendre mes distances hargneuses. Je ne suis pas parfaite. Loin de là.
....

What can be seen through a camera lens, a window, a balcony and a rose bush
(when one isn't seen)
and, what one can save of an afternoon, when one has to

It's hard. Very, very hard.

And I know that it is no one's business by our own, and so it must be treated with the greatest care.

Step-families, those blended families as we like to call them, like Smoothies, are never, or only very rarely, easy. One is dragged back into the past at every instant. Hearts have been broken, and a heart never repairs itself easily, and when we are angry with someone, it is even difficult to want to. Anger offers its terrible relief in the place of forgiveness. It can be said about children as much as about adults.

Everything takes on larger-than-life proportions. A child yells insults at her father at the top of her lings in the yard, where everyone in the neighborhood can hear without straining an ear, "You are hurting me! You're hurting me! Stop! Stop! Don't touch me!" followed by screams loud enough to wake the dead, and it is nothing like the same fury directed at a divorced or separated father from his child.

He is already hurt. He has already failed somewhere in making a family only to see it come apart. He feels guilty. Somewhere inside, he is happy, or relieved, that a bad relationship is over, for the most private of reasons. I won't speak of them here, not now. Not like that. It suffices to accept it. The relief in continuing his life, better, elsewhere, without having done wrong is at odds with the will of his children, who want everything to stay as it was.

But, it's not the children who decide the family's fate, the fate of the couple at its center.

Even, sometimes, one of the parents, the one who has seemed to have decided, does not live their choice easily, and upsets the children.

Upsets the other they can still hurt, the one they feel has taken their place.

....

It's there that one must...

One must.

....

They say that it is up to the adults to understand. Oftentimes, I am convinced that the children understand just as well as the adults. They do as we do. They know. They know how to hurt others, too.

What they don't understand, not fully, are the consequences of their actions, of their words, of their behavior. What we know is that we have to respond to teach them. We don't all know how to do it. The father thinks that in loving them, in remaining stable, imperturbable, in demanding that his child calms down, obeys, we will prove his love, which must, coupled with his authority, be enough to make everything work out in the end.

But, I have never been convinced of that.

....

We have to teach them to manage their feelings and to interpret, to be honest with themselves, to live their lives without sacrificing them to their parents' unhappiness, to the past, to the No man’s land between their parents that used to be their relationship, not to say their love, because there has not always been love.

We have to know how to help them calm themselves, that is to say to bring them to calm they feel inside themselves.

We have to find the real desire -- often enough nearly impossible to want to find -- to help and not to hurt. To show kindness, not to say love, because maybe we don't love them, not exactly. To remain faithful or true to oneself and do what we believe is required, even if that is not necessarily welcomed or appreciated by the other.

Because enough with the suffering, and enough with the anger. How can one live with such terrible forces always simmering inside?

....

At the height of the temper tantrum this afternoon, Baccarat ran in circles in the garden, nearly hysterical from anxiety, unable to understand the reason for the screams and shouts they heard.

She is a dog. A child screams and runs from her father, fighting him, who is not trying to hurt her, but she screams. Baccarat tries to help, but she doesn't know how.

"Please, Baccarat is worried about you. Stop, please, at least for her. She doesn't know what to do."

She is a dog, and one of her humans is screaming.

....

It came to me. I told her father not to let her go hoe to her mother. It would only be more terrible. This endless back and forth between her parents in anger and hysteria.

"Don't do it."

"I am going to ."

....

I turned to her, as she arrived, loaded with her bags. I told her, "Don't go back to your mother without taking the time to calm down to think." I said everything to her that I have been thinking for weeks. I didn't have a choice anymore.

She put down one bag. Then the other. She sat down.

"If you go home, you will remember this moment, and all the others just like it before, the rest of your life, and it will hurt you, even when you will be grown up like I am. It isn't alright to go home furious and then come back sweet as saccharin, a good little girl, without saying anything. That is not what makes us forgiven or forgives. You remember. We remember. That is not frank. That is not love. Love requires courage. It is you who will decide, but in calm."

I placed my palm on her head. I asked her pardon for the hurt I have caused her in the silence of my own anger and hurt.

She stayed.

....

Her father asked her to sit hear him. She doesn't move. She doesn't reply. I see. She is working things out. We have to leave her alone. I signaled to him to be quiet and let her be.

"And if we did like we do with the dogs? We ask one time, only once. If you want to go sit next to your father, do it, simply, directly. If you don't want to, don't do it. If you change your mind, tell him, but always say the truth. Don't make people beg for your love."

....

Baccarat is there in the picture, taken after the storm passed, even if you can't really see her next to her, stretched out on the lawn. She is watching over her. She is showing her loyalty to one of her humans.

The father was able to finish an afternoon with his children, come from that broken family.

....

Now, Baccarat is snoozing behind my chair.

....

The girl has gone home. She said good-bye leaving. Most often these days, we say nothing to one another when they leave. For some time now.

"Until Thursday."

"Until Thursday. Thank you for rethinking and staying."

....

Her father returned.

"Thank you for her," he said. Of course he said her name. I won't say it here, now.

I don't say "You're welcome" either. It's not necessary, and he doesn't wait to hear it before turning to leave the room, either.

....

It's not finished. I will be obligated to continue what I have tried to start, even when I will probably rather retreat into my cold, hateful distances.

I am not perfect. Far from it.
....